Pouvoirs visibles et invisibles

Nous vivons, petits zou grands, sous l’empire de deux sortes de pouvoirs.

Les pouvoirs visibles, comme les parents, les supérieurs hiérarchiques, parfois la maréchaussée, le préfet, qui sont ou ne sont pas oppressants. Si vous ajoutez le système de santé, ce qu’il reste de l’éducation, qui sont également des pouvoirs de guérir, de se former, d’apporter des subventions sous une forme ou une autre, vous constatez là encore que pouvoir ne rime pas toujours avec dictature. Quoique le pouvoir porte en lui le désir d’excès de celui qui le pratique. Mais bon, ce n’est pas le sujet.

Les pouvoirs invisibles sont tous ceux qui influent également, mais qu’on ne rencontre jamais ou quasiment : le propriétaire, Mr Cetelem, la commission européenne, la haute autorité de la concurrence et d’autres.

Leurs choix, leurs actes, leurs décisions peuvent, sans que nous y puissions rien, nous aider ou nous mettre la tête sous l’eau.

Dans les deux cas, visibles ou pas, nous parlons là de pouvoir localisés, et le flou sur la place exacte de leur empire ne change pas grand-chose à la perception que nous en avons.

Vous conviendrez que les pouvoirs visibles sont les plus à même de « sembler » être les plus décisifs. Ils vont sembler porter toutes les responsabilités de bien être, de mal être et toute la gamme entre les deux. Nous avons tendance à accorder de l’importance en fonction de la proximité. Si je vous dis « telle banque à tel endroit détient et pratique un pouvoir de prédation à côté duquel on ne trouve que le troisième Reich comme comparaison possible. ». Bon, ok. Les banques, c’est méchant. Mais dans mon quotidien ? Ma femme aimante, mon chef rigolo, mon proprio pénible, mon patron craignos (vous pouvez inter changer les adjectifs).

Dans votre quotidien, mais invisible, Goldman Sachs concentre 507 000 Milliards de capitalisation. Ça fait beaucoup, mais vous vous en moquez. C’est un pouvoir invisible, dont les décisions sont autrement lourdes de conséquences, comme la décision de vous virer ou de vous proposer le même poste en Slovénie. C’est con, vous vous seriez renseigné, vous n’auriez peut être pas autant cherché à travailler dans une boîte dont les principaux actionnaires sont conseillés par Goldman Sachs. Bon d’accord, vous n’aviez pas le choix. Mais vous pouvez toujours chercher à comprendre ce pouvoir et ses effets, pour en déduire les interdits qu’il faut poser à ce genre de racaille pour les empêcher de nuire.

===============================================

Il se trouve que chaque personne à son échelon est exactement dans la même situation, rien de génial là-dessous. En revanche, nous ne voyons pas ces pouvoirs invisibles dont sommes trop éloignés dans la chaîne. Donc nous pensons qu’ils n’existent pas. Oui mais non, on va s’embrouiller : comment puis penser à un truc dont je suis persuadé qu’il n’existe pas ? C’est toute l’astuce. Relisez depuis le début. Ou pas.

D’autant plus que certaines chaînes de pouvoirs existent, comme dans des mondes parallèles, ne se voient entre elles qu’à travers la télévision, et ne communiquent pas, comme vous pouvez le faire avec votre conjoint, enfant, voisin, pote, ami ou contremaitre, médecin du travail vite-fait etc…

Les médias, vous savez comment ça marche là-dedans ? Le CAC 40 ? Les assurances ? Les commissions au parlement ? le MEDEF ? La CGT ?

Vous me direz, « et Hollande ? ». Futé. Si vous acceptez la comparaison grossière avec une pyramide, la pointe de la pyramide détient à peu près tous les pouvoirs. Les 50 000 mecs tout en haut ns sont donc pas stressés, comme vous pouvez l’être vis-à-vis des actionnaires de votre boite en cours de projet de délocalisation. Ils sont les pouvoirs invisibles.

Bref, là où je veux en venir, c’est que nous avons tous, chacun à notre niveau, à lire, à chercher, à connaître tous ces pouvoirs qui se cachent, tellement ils sont peu fiers de leurs méfaits.

Non pas pour les attaquer comme des moulins à vent, mais pour penser le pouvoir, et être ensuite capable de penser les contre-pouvoirs, si c’est nécessaire.

Apprenons à nous passer de la plupart de ces pouvoirs, qui prétendent représenter un groupe, alors qu’ils sont depuis longtemps déconnectés de leurs motivations premières, ou de ces « experts » incompétents. Parce que pour merder autant, je vous assure que vous ne pourriez pas faire pire, et en fait, chacun de vous, chers lecteurs/trices, est notre meilleur espoir de faire mieux. C’est très pragmatique, le truc : pourquoi surpayer un con surdiplômé, alors qu’on pourrait avoir un con normal tiré au sort, nettement moins cher, et forcément plus prometteur. Le con normal aura plus probablement conscience de son état de con, et saura se faire aider. Sinon on l’aidera quand même sans se farcir le tempérament hautain d’un énarque.  Ce « normal » deviendra, lui, nettement moins con et surtout, moins dangereux.

Comprendre comment fonctionne un pouvoir permet de viser juste, là où c’est efficace, le branchement qui change tout. Pourquoi ruiner les murs pour chercher les fils à couper, quand il suffit d’aller au compteur appuyer sur le bouton rouge.

Connaitre les pouvoirs, chercher leur constitution : d’où sort cet organisme, cette haute autorité, ce club de banquiers, ce club de chefs d’entreprises ? Qui nomme qui ? Certains pouvoirs, matérialisés dans tel club, conseil d’administration ou commission à l’assemblée, veillent à délibérer secrètement. Il y a des limites à la voyance : ce qui est vraiment caché le restera.

En revanche, sachons profiter de ceux qui ne se cachent pas.

Vous pouvez détecter dans votre vie ces lieux de pouvoirs, vous avez affaire à eux, un jour ou l’autre, de près ou de loin.

Tiens, hier, en Juillet 2013, la « Haute Autorité de la Concurrence » a pris une décision. Bref à la fin, c’est 5% de hausse de l’énergie et 5 l’an prochain. On parle de transition énergétique : on a qu’à augmenter l’énergie. Et comme par magie on va transiter énergétiquement. Soit c’est la vraie raison, et alors ce sont les politiques qui doivent le dire, soit ça a à voir avec la concurrence.

Si cela a à voir avec la concurrence, examinons, sur son site web, cette totorité, qui en parfaite loyauté nous livre le mode de désignation.

Allez voir, c’est Hollande qui désigne. La Haute chose de la concu, c’est un secrétariat de F. Hollande. Dont un professeur de « sciences économiques » à la fac de chpountz, c’est dire !

Les autres godelureaux ? Que des cooptés, que des gens de biens, des notables, et quelques Administrateurs de LVMH ou de Kiala. Des fous furieux de la protection sociale. Des obsédés du pouvoir d’achat des classes laborieuses. Des cégétistes infiltrés. Des hologrammes marxistes !

Une fois que vous êtes allés voir qui c’est, qui les a mis là, vous savez à qui ils doivent faire la révérence pour garder le fromage.

Ensuite, vous pouvez dire : « Et si ce genre d’autorité existe, pour autant qu’il en faille une, pourquoi ne pas la tirer au sort dans la population, y cloquer trente membres, avec webcam obligatoire, sauf dans les chiottes construites spécialement pour que l’on ne puisse pas s’y réunir. »

J’y vais un peu fort, mais qui vous empêche de partir de là, d’affiner. Mais l’affinage consiste à leur fournir de bonnes conditions de travail, c’est bien la moindre des choses que nous leur souhaitassions ce que nous souhaitons pour nous-même. Et surtout ne pas oublier : révocables, doivent rendre des comptes, mandat unique.

Mais je le répète, la première question est : qui a créé ce pouvoir, pour en faire quoi ? Si c’est finalement une autre bande d’hommes du président, on peut alors se demander pourquoi créer ce truc. Eh bien tout est dans le qualificatif indispensable qu’on nous ressort forcément : Le machin est composé de sages indépendants. Sages, je ne sais pas, mais indépendants, mon postérieur ! Le truc est forcément créé pour notre bien, cela va sans le dire.

Fillon a dit :

« Le premier ministre a annoncé lundi soir trois mesures pour lutter contre la flambée des prix des produits alimentaires et pointe du doigt la responsabilité des industries et des distributeurs.

«Il y a manifestement des abus de la part des industries et des distributeurs qui profitent (des) hausses des matières premières agricoles pour accroître leur marge». Le premier ministre, François Fillon, qui s’exprimait lundi soir à l’issue d’une réunion interministérielle «sur l’évolution des prix des denrées alimentaires» a voulu afficher la détermination du gouvernement. Un gouvernement qui, a-t-il dit, «ne restera pas inactif face à des comportements qui sont inacceptables et qui nuisent à nos concitoyens». En conséquence, il a annoncé trois mesures pour faire face à la hausse de ces produits, récemment épinglée par l’Institut national de la consommation.

Parmi celles-ci, la création d’une «Haute autorité de la concurrence avec des pouvoirs accrus » pour «renforcer la concurrence». »

25/2/2008 Le Figaro. Je ne lis que des journaux sérieux.

Génial, la concurrence avait effectivement bien besoin d’être renforcée. Enfin, on s’occupe des mal en point dans ce pays.

Et donc un peu plus tard, Hollande, qu’on a appelé un temps, dans une autre vie viking, au 5ieme siècle, « Le couillu de Svendenbỗrg », s’est resservi du machin pour faire passer sa pilule.

FH – Allo ? La Haute Chose ? C’est le président ? Ici Hollande !

BL – Bruno Lasserre à l’appareil. Mes hommages, Votre Grandeur, que votre chemin soit jonché de pét..

FH – Ça ira le cirage, je suis en tong. Bon, dis donc pépère, je vais te refiler l’occasion de briller, et en passant de mériter ton traitement scandaleux que tu me dois. Truc chose d’Edf, bidule chouette d’ENI et d’autres plumeaux m’ont convaincu de créer de l’emploi par la hausse de l’électricité et du gaz. Tu vas m’emballer ça dans ta sagesse et ta concurrence et l’annoncer mi-juillet. C’est dans tes cordes ?

BL – Mais bien sûr, mon amour, je

FH – tuut tuut, tuut tuut…

Si vous regardez bien le machin, vous voyez vite, avec le mode de désignation des sages, que c’est une arnaque.

C’est ça, construire une alternative politique.

Dégager son esprit des influences de l’industrie de la distraction, et c’est super dur, puis se former, aller de site en site, lire quelques livres, regarder des conférences. Et surtout, discuter, discuter, discuter.

Chercher ceux qui ne sont pas d’accord avec vous, et chercher à comprendre ce qui les anime, les motive. Les pousser tranquillement à vous livrer leurs objectifs, leurs moyens, leur maîtres. Comprendre leurs intérêts personnels, parce qu’ils ont dû pleurer pour avoir le poste.

Peut-être découvrirez-vous avec quelques discussions des motivations inattendues, qu’il vous faudra recevoir comme une preuve : on ne fabrique pas et on ne tripote pas des preuves. Et si elles vous emmerdent, les preuves, là, cela risque de devenir passionnant. Si votre réflexion est bidon, autant la lâcher le plus vite possible. Ce ne sont pas vos amis qui vont monter sur la table pour crier que vous vous plantez complètement. Un vrai contradicteur, si. Il est là pour cela. D’où son nom.

En revanche, une objection bien sentie et bien pensée va vous obliger au moins à affiner votre raisonnement.

Faut que je m’inscrive sur www.adopte-un-fan-de-l’ump.fr.

Sans déconner, il y en a qui ont cliqué ?

Je vous recommande, comme d’autres avant moi, un livre pas trop dur à lire, un type très fort mais qui n’écrit pas pour un jury de faculté et qui en plus parle de votre vie, de vous.

Auteur : Alain, Titre : Propos sur les pouvoirs.

Là, il y a tout.