Art 46 Lois organiques

Article 46

Les lois auxquelles la Constitution confère le caractère de lois organiques sont votées et modifiées dans les conditions suivantes.

Le projet ou la proposition ne peut, en première lecture, être soumis à la délibération et au vote des assemblées qu’à l’expiration des délais fixés au troisième alinéa de l’article 42. Toutefois, si la procédure accélérée a été engagée dans les conditions prévues à l’article 45, le projet ou la proposition ne peut être soumis à la délibération de la première assemblée saisie avant l’expiration d’un délai de quinze jours après son dépôt.

La procédure de l’article 45 est applicable. Toutefois, faute d’accord entre les deux assemblées, le texte ne peut être adopté par l’Assemblée nationale en dernière lecture qu’à la majorité absolue de ses membres.

Les lois organiques relatives au Sénat doivent être votées dans les mêmes termes par les deux assemblées.

Les lois organiques ne peuvent être promulguées qu’après déclaration par le Conseil constitutionnel de leur conformité à la Constitution.

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Cet article, auquel je ne vois pas de tare apriori, pose quelques questions :

J’ai déjà évoqué mon doute sur la ‘loyauté’ des lois organiques. La vocation de la loi organique est utilitaire.

La constitution est généralité juridique, par exemple « homme et femmes sont égaux en droits et prérogatives ». C’est juste un peu plus précis que « tous les hommes sont … » où « homme » signifie « humain » et non pas humain porteur de gonades.

Entrer dans le détail comme pour les loi sur l’égalité des salaires, égalité de carrière, égalité juridique (jusque dans l’année 60, une femme ne pouvait avoir de compte en banque sans l’autorisation écrite de son mari), ne peut pas figurer dans la constitution.

Mais si une loi dit que tel concours n’est ouvert qu’à des hommes ou qu’à des femmes, en dehors de considération objectives scientifiques (on recherche nounou allaitante H/F…), elle n’est pas constitutionnelle.

Maintenant si je dis dans la constitution : « les notions d’égalité seront déterminée dans une loi organique », c’e n’est plus du tout la même chose. On passe de :

Art Const X Hommes et femmes sont égaux en droits et prérogatives ». C’est verrouillé.

à :

Art Const Y « L’égalité homme/femme sera précisé dans une loi organique », c’est tout autre chose.

Avec la deuxième solution, en respectant les délais pour faire passer une loi, sachant que la publicité n’est pas obligatoire, le parlement peut préciser, selon les appétits de ses commanditaires, que le traitement doit être égal, ou bien l’année suivante, que les femmes peuvent recevoir un traitement de 27% inférieur, en moyenne. C’est le cas aujourd’hui.

Pas besoin de référendum. Pas besoin non plus pour passer de 27 à 32%.

Ces lois organiques sont faites par le parlement, mais avec une cérémonie plus imposante : comme ce sont des lois « limite constitutionnelles ». Cérémonie, c’est tout. Le blabla ci-dessus ne sert qu’à poser des détails règlementaires : il a semblé important à Charlot de préciser les délais. Mais pas le caractère effectif quasi-constitutionnel de ces lois organiques qui sont à l’appréciation du parlement, et il a soigneusement dispensé le peuple d’y fourrer son nez. Et ça, c’est grave.

Entre le mot « Constitution » et « Référendum », il y a un lien par nature : comme on touche aux principes vitaux, le référendum est obligatoire pour l’adoption initiale et les modifications. Oh puis non, pas pour les modifications, qui ne peuvent être d’initiative populaire, ni même parlementaire, pensent nos bons maitres.

Premier accroc : la constitution est modifiable avec 3/5 du Parlement. Si on sait que le Parlement est tout sauf représentatif, alors cela veut dire que les intérêts des commanditaires des membres du parlement suffisent à modifier la constitution. C’est déjà un problème.

Les lois organiques bénéficient d’exigences plus modérées. La majorité 50% + une voix, la majorité « simple » suffit, contre 3/5 pour toucher la constitution elle-même.

Dire dans la constitution que tel ou tel domaine relève de la loi organique est un trompe-l’œil.

Pourquoi ?

Si on parle d’un détail, pas la peine d’en parler dans la constitution.

Si ce n’est pas un détail, il s’avère nécessaire de mentionner les domaines concernés dans la constitution. S’agissant de la monnaie, par exemple (quelle monnaie, qui gère, selon quels principes…), qui est primordial-essentiel, si le constituant est clair, qu’il indique : Article chose, la monnaie est comme ceci et cela, peut…, ne peut pas… » C’est gravé dans le marbre, et en théorie les institutions ne peuvent pas toucher.

Mais dans le cas de notre constitution, la monnaie est un détail pas fondamental, et les députés, qui ne sont soumis à aucun devoir pratique envers les électeurs, pourront en tripoter le fonctionnement à leur convenance, ou à la convenance de leurs commanditaires.

Je considère comme une ignominie que la constitution puisse être modifiée sans référendum, et soit en pratique sous contrôle du législatif, qui par définition est en conflit d’intérêts.

C’est premier principe qu’une modification, telle l’adoption du traité européen en 2005, fasse l’objet d’une constituante tirée au sort, comme s’il s’agissait de tout réécrire de zéro. Ce qui n’a pas été le cas avec le traité de Lisbonne.

Vue les conséquences pratiques sur la vie en France, ce n’est même pas un référendum qui s’imposait, mais une constituante. Donc tirée au sort.

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Alors donc l’astuce, c’est de mentionner le sujet, parce que sinon ça semblerait suspect, mais de ne pas le traiter, et de le renvoyer à une loi organique.

L’argument de vouloir alléger la constitution, de ne pas y mettre de détail est en l’occurrence une escroquerie de mauvaise foi : mettre la monnaie entre les mains du parlement est un crime démocratique. Ne pas y graver la totale indépendance de la banque centrale, c’est gros.

Si on revient au Monsieur Charles qui a pondu cette merveille avec ses potes, je verrais bien que cette idée de laisser la monnaie dans le vague lui a été soufflée, car je doute que le général a eu quelque compétence naturelle pour la grosse finance. En dehors des budgets militaires, il ne devait pas y entendre grand-chose. Des bourgeois fortunés et feutrés se sont occupés de tout.

Vous comprenez que le choix de faire une constituante présente un minimum nécessaire, dès lors que l’on se réclame de la Démocratie, pure, vertueuse, magique totem de la prospérité partagée.

Ensuite, nous avons vus en 2005 l’impasse démocratique, l’échec programmé, j’insiste sur le qualificatif, d’une constituante rédigée entre amis banquiers (dont Giscard…), en lieu clos.

Une constituante n’est pas suffisante pour la démocratie. Si on suppose un désir de démocratie, ce qui n’est qu’une projection fictionnelle pas documenté chez la plupart de nos concitoyens, et même probablement votre cas, sauf ton respect, ô vénérable lecteur, alors, on doit rassembler toutes les conditions propices à la rédac d’un papier démocratique.

Par exemple, on doit s’assurer que les constituants n’ont pas de conflit d’intérêt avec les sujets abordés. On peut détecter des évidences (Banquier-Avocat d’affaire-etc et la monnaie, conseiller fiscaux et à peu près tout), mais il est illusoire d’espérer filtrer. En plus, pas forcément utile, si la constituante est nombreuse et tirée au sort. Avec un filtrage sanitaire à l’entrée, mais pas d’inquisition.

Partant du principe de l’oligarchie actuelle, les décideurs nocifs représentent moins de 1% de la population. Un tirage au sort de six cent constituants promet la même proportion, soit 3 Bernard Arnault. Et alors ? Si la constituante est organisée en veillant à ce qu’aucun intérêt ne soit présent au-delà de la réalité, soyons confiant dans le fait que le pire risque est que la constitution soit aussi conne que nous le sommes. Ce qui ne peut pas être pire que « malveillante ». J’attends les objections.

Tout ça pour dire :

A bas les lois organiques !

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