Référendum en chocolat

Article 11 (1)

§1 Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la Nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions.

§2 Lorsque le référendum est organisé sur proposition du Gouvernement, celui-ci fait, devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d’un débat.

§3 Un référendum portant sur un objet mentionné au premier alinéa peut être organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. Cette initiative prend la forme d’une proposition de loi et ne peut avoir pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an.

§4 Les conditions de sa présentation et celles dans lesquelles le Conseil constitutionnel contrôle le respect des dispositions de l’alinéa précédent sont déterminées par une loi organique.

§5 Si la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi organique, le Président de la République la soumet au référendum.

§6 Lorsque la proposition de loi n’est pas adoptée par le peuple français, aucune nouvelle proposition de référendum portant sur le même sujet ne peut être présentée avant l’expiration d’un délai de deux ans suivant la date du scrutin.

§7 Lorsque le référendum a conclu à l’adoption du projet ou de la proposition de loi, le Président de la République promulgue la loi dans les quinze jours qui suivent la proclamation des résultats de la consultation.

Celui-là est une perle !

§1 : Le président décide seul de l’opportunité d’un référendum. La mention du gouvernement est de pure forme. Dans l’ordre hiérarchique pratique, le gouvernement le proposera si et seulement si le président le veut. Le peuple n’est pas convié.

§2 Très bien pour les assemblées, mais le peuple ? Il ne peut débattre. Le pouvoir du débat a été remis sans réserve ni contrôle aux représentants.

Le président est le maitre de la « question posée ». On sait combien la façon de poser la question aiguille les réponses.

§3 Référendum populaire. Tu parles : d’abord il faut que plus de cent députés se mettent d’accord et le demandent. Déjà là, c’est mort. Mort de mort. Fini. Mais ce n’est pas fini : pour le cas où une bande d’énergumènes atteindra le chiffre fatidique, il faut rassembler dix pour cent de signatures du corps électoral. Donc il faut qu’une question soit confirmée par 10% des voix. Dans la pratique, aucune idée originale n’a de chance d’être discutée. Où est l’initiative populaire ? Cet alinéa est une insulte à tous les citoyens, qu’ils soient mes amis ou non. Le pouvoir a peur du peuple.

§4 une loi organique fixe les conditions de l’application. Une loi concoctée dans les arcanes du pouvoir exécutif. Inutile de dire qu’elle ne va pas faciliter les choses. Alors qu’il s’agit bien là typiquement de détails qui devraient figurer dans la constitution. Dans la mesure où un référendum est le seul moyen de changer la constitution, il est dictatorial, je pèse le mot, d’en réserver l’usage au chef de l’exécutif, avec une loi organique de son cru pour l’application du texte. Le §4 est très précisément anticonstitutionnel.

§5 et si les assemblées envoient aux pelotes le président, celui-ci peut passer outre. Formidable ! On voit là un très bon exemple de contre-pouvoir aux assemblées. Vous noterez que ce contre-pouvoir n’est pas donné au peuple mais au leader maximo.

§6 Et si le peuple n’est pas d’accord, même le simulacre de référendum populaire lui est retiré : un délai de deux ans permet de garder la main et d’éviter la contradiction. Si le peuple n’est pas d’accord sur une direction proposée, il lui est retiré pendant deux ans la possibilité de désigner la direction qu’il préfère. Un non à un référendum n’oppose rien à la toute-puissance du président, et même lui garantit deux ans de temps pour reformuler ses ambitions, et celles de ces commanditaires privés.

§7 Ca ne mange pas de pain. Vu que le projet à mettre en œuvre, c’est le sien…..

 

Ce texte grave dans le marbre la situation suivante : le chef de l’exécutif décide de tout, y compris au plan législatif, par le fait que le président est le chef de la majorité et considère que sa majorité parlementaire n’est là que pour valider ses actions. La discipline de parti veille ! Sinon, pas d’investiture pour se faire réélire.